Louis Cane est l’un des protagonistes les plus actifs du groupe Support-Surfaces qui cherche à réaliser le “degré zéro” de l’art en déconstruisant la peinture par une analyse “matériologique” de ses éléments. Cette analyse s’accompagne nécessairement d’une remise en question de l’accrochage traditionnel : les “tableaux” sont simplement agrafés au mur ou posés sur le sol sans châssis. La pratique picturale de Louis Cane; s’énonce comme une démonstration de la peinture par ce qui la fait; il s’agit d’élaborer l’inventaire de toutes les qualités intrinsèques de la toile non plus, comme écran-plan mais comme une surface dans l’espace. Avec ses toiles au sol, Louis Cane, contrarie tous les modes et habitudes d’appréciation de la peinture. La couleur qui n’est plus brossée mais pulvérisée dans l’épaisseur même de la toile par diffusion et saturation de l’huile, et sa présentation horizontale modifient les principes perceptifs qui ordonnent la vision. Cane prolonge les recherches menées par Matisse puis par les peintres américains de l’après-guerre qui rejettent le système traditionnel de représentation pour témoigner de la frontalité du tableau, de l’arbitraire de ses limites et du travail de la couleur non plus soumise au dessin. Exploitant les contradictions, notamment les tensions de la toile avec les plis du drap, la transparence du pigment avec la densité de la matière colorée, Cane fonde son travail dans les années 70 sur l’opposition entre une analyse rationnelle du matériel artistique et un fonctionnement illogique et instinctif de la couleur, produit par ce qui la met en scène, le geste c’est-à-dire, le corps.