La « Route des Phéniciens » et le double-shekel du roi Adremelek de Byblos

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De nombreux pays méditerranéens s’accordent aujourd’hui pour construire un itinéraire culturel appelé avec raison « Route des Phéniciens ». Cet ancien peuple sémite fonda dès le IIIe millénaire avant notre ère, sur l’étroite bande côtière rocailleuse de la Méditerranée orientale, des cités-États comme Byblos, Beritos, Tyr et Sidon, anciennes perles de l’actuel Liban. Les Phéniciens allaient chercher au-delà de la mer les produits nécessaires, métal, denrées, épices… exportant bois de cèdre et produits finis, ils faisaient commerce du papyrus provenant d’Egypte et très demandé en Grèce.

En marins avertis et commerçants accomplis, ils tracèrent des routes maritimes commerciales puis, à partir du IXe siècle avant J.-C., essaimèrent des colonies de peuplement d’est en ouest. Ces fondations ont marqué le sol des pays actuels qui adhèrent à la « Route des Phéniciens », à Chypre (Kition, Idalion, Tamassos, Paphos), en Tunisie (Carthage, Leptis Minor, …), dans l’ouest de la Sicile, en Sardaigne, en Espagne et au-delà des colonnes d’Hercule.

Adramelek, (vers 350 avant J.-C.), double-shekel, argent, 13, 19 g, diam. 26 mm. Dans British Museum, G.K. Jenkins, Monnaies grecques, Office du Livre, Fribourg, 1972, p. 153, n° 331

Les cités-États phéniciennes frappaient monnaies et diffusaient au IVe siècle avant J.-C. de belles pièces en argent à l’iconographie évocatrice. Les motifs représentés indiquaient la provenance, l’origine culturelle et les intentions de l’émetteur. La cité-État de Byblos, la plus ancienne des cités phéniciennes, a produit ce magnifique et double-shekel frappé vers 350 avant J.-C., au nom de son roi Adramelek, écrit au droit de la monnaie, en caractères phéniciens qui rappellent l’influence qu’a eu cette écriture dans l’évolution des langues grecque, araméenne et arabe.

Adramelek, (vers 350 avant J.-C.), double-shekel, argent, 13, 19 g, diam. 26 mm. Dans British Museum, G.K. Jenkins, Monnaies grecques, Office du Livre, Fribourg, 1972, p. 153, n° 330

Au revers, une galère armée occupe le premier registre. Elle est menée par des guerriers équipés de leurs casques à cimier et de leurs boucliers, équipement qui s’impose pour assurer la maîtrise militaire sur mer. Le deuxième registre, sous la galère, est celui de l’hippocampe. La mythologie s’est emparée de l’animal marin et l’a rendu fabuleux, à la fois marin, terrestre et aérien. Présentant une puissante queue de poisson, le reste du corps est un protomé de cheval pourvu de pattes antérieures et d’une de ses ailes majestueuses bien dessinée. Notre hippocampe se joue des éléments. Un coquillage occupe le troisième registre et semble souligner les deux précédents.

 C’est le Charonia variegata, un gastéropode marin, triton de la famille Ranillidae très répandu en Méditerranée orientale. Ce beau coquillage familier aux Phéniciens fait référence à leurs territoires marins coutumiers.
Le revers de cette extraordinaire monnaie véhicule le message de l’autorité phénicienne vers leurs partenaires et fondations, filles phéniciennes de Tyr.

Les collections des musées des pays méditerranéens témoignent de cette histoire exceptionnelle et s’unissent aujourd’hui pour créer un itinéraire inspiré de celui des Phéniciens où les creusets culturels foisonnent.

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